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INTRODUCTION À L’HISTOIRE

n’a pas fait de commentaire[1]. « Le maître n’est sans doute autre que Vasubandhu, auteur de l’Abhidharma kôça ; et ce passage, s’il doit être entendu comme je propose de le faire, nous donne sur la nature et la forme du traité de Vasubandhu des lumières qu’il est bien difficile de trouver dans les autres parties de la glose de Yaçômitra.

Quoi qu’il en soit, cet ouvrage est une compilation de textes et d’interprétations philosophiques. L’auteur y traite des caractères généraux des êtres, des conditions ou des lois, car le mot Dharma signifie toutes ces choses ; des qualités sensibles, des sens, des éléments, de la sensation et de la connaissance ; de la succession des effets et des causes ; de l’affection, de la haine, de l’erreur, et des autres modifications morales du sujet ; de la naissance de l’homme, de la destinée, du fruit des œuvres, du passage de l’homme dans les diverses voies de l’existence ; des divers degrés de vertu et d’intelligence auxquels l’homme peut atteindre en ce monde ; de l’action des organes des sens dans le fait de la connaissance, et des conditions qui arrêtent ou favorisent cette action ; de l’homme et de la femme considérés sous le rapport physique ; des passions, et de la nécessité de les dompter ; du plaisir et de la peine, de la nécessité de s’en affranchir pour parvenir au Nirvâṇa, c’est-à-dire à la perfection du repos absolu ; des conditions de l’existence humaine et des fonctions des organes ; de la Pravrĭtti (l’action) et de la Nirvrĭtti (le repos) ; des degrés divers de l’humanité quant à l’instruction, et de la perfection relative des sens de l’homme ; des facultés surnaturelles ; du passage des intelligences supérieures dans les divers degrés de l’existence ; des Dêvas et des nombreuses classes dans lesquelles on les divise, des Enfers et des mondes. Ces sujets, dont aucun n’est examiné d’une manière suivie, encore moins dogmatique, sont entremêlés les uns aux autres, et la même matière se représente en plusieurs endroits de l’ouvrage. La doctrine en appartient manifestement à l’école la plus ancienne du Buddhisme, c’est-à-dire à l’école athée. Je trouve sur la question de l’existence de Dieu un passage très-frappant, qui ne laisse aucun doute sur la tendance de cet ouvrage, ou au moins sur les idées du dernier commentateur. J’ai cru que ce passage méritait d’être traduit comme spécimen de la méthode que suit Yaçômitra, quand ses devoirs de commentateur lui laissent assez de loisir pour parler en son propre nom.

« Les êtres ne sont créés ni par Dieu (Îçvara), ni par l’Esprit (Purucha), ni par la Matière (Pradhâna). Si, en effet, Dieu était la cause unique, que ce Dieu fût Mahâdêva, Vâsudêva, ou tout autre principe, comme l’Esprit ou la

  1. Abhidharma kôça vyâkhyâ, f. 157 a de mon manuscrit.