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DU BUDDHISME INDIEN.

buddhiques sous leur vrai jour ; elles sont encore destinées à expliquer pourquoi il n’y faut pas chercher l’histoire de la collection dont ils font partie. On y trouvera, comme je l’ai prouvé par l’analyse des Sûtras, le tableau de la société indienne au temps où vécut Çâkyamuni, et outre ces notions générales, l’indication précise des personnages dont sa prédication le rapprocha. Ce sont là des données précieuses dont je tâcherai de faire usage pour mon esquisse historique du Buddhisme indien. Mais elles ne nous apprennent rien sur la date des livres où nous les rencontrons, puisque ces livres peuvent avoir été rédigés bien longtemps après les événements qu’ils rapportent. Les seuls secours que nous possédons pour étudier l’histoire des livres sacrés du Népâl sont les renseignements que nous a transmis la tradition, et ceux que nous fournit l’examen approfondi de ces livres mêmes. C’est à cette double source que sont puisés les faits dont je vais présenter le tableau abrégé dans cette section, la dernière qui soit consacrée à l’étude de la collection buddhique du Nord.

J’entends ici par tradition non-seulement l’ensemble des opinions et des faits que M. Hodgson a recueillis au Népâl, dans ses conversations avec des Buddhistes instruits, ou dans l’étude qu’il a faite de leurs livres, mais les opinions et les faits qui sont reconnus par les Buddhistes du Nord en général, et en particulier par les Tibétains. J’ai déjà dit comment je me croyais autorisé à invoquer le témoignage des Tibétains, toutes les fois qu’il s’agit du Buddhisme septentrional, quoique les ouvrages qui font autorité chez ce peuple ne soient que des traductions de textes sanscrits, et que ces traductions ne soient pas antérieures au viie siècle de notre ère. Je me contente d’ajouter ici que cette date du viie siècle est la dernière limite à laquelle s’arrête, dans les temps modernes, l’histoire de la collection sacrée des Buddhistes septentrionaux. Cette limite n’est pas absolument rigoureuse, puisque toutes les traductions qui ont pris place dans la bibliothèque tibétaine du Kah-gyur ont été exécutées, au rapport de Csoma de Cörös, entre le viie et le ixe siècle de notre ère, et que le travail de l’interprétation s’est continué plus tard encore. Mais quelque flottante qu’elle soit, elle assure à la partie la plus importante de la collection népâlaise quelques siècles d’existence de plus qu’on ne serait peut-être tenté de lui en accorder, à ne considérer que la date de l’année 1822, où M. Hodgson l’a découverte dans la vallée du Népâl. Qui sait si quelqu’un de ces critiques, qui pour juger de l’histoire d’un peuple se croient dispensés de connaître sa langue et sa littérature, n’aurait pas fini, après de longues méditations, par se convaincre que la collection buddhique du Népâl a été fabriquée à petit bruit, au commencement du xixe siècle, à l’effet de mettre le comble à la fraude qui avait si bien réussi aux Brâhmanes, lorsque peu de temps auparavant ils s’étaient fait une littérature, afin