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APPENDICE. — No II.

première partie de notre Sâmañña phala de ce double titre : « Les Dix voies des actions vicieuses, et les Dix voies des actions vertueuses, » comme le fait le Sag̃gîti, sans nous apprendre autre chose, sur ces deux catégories, que le nom seul des termes dont elles se composent. Dans le même recueil, celui du Sag̃gîti, on distingue parmi les dix Kusala kamma pathâ, ou voies des actions vertueuses, quatre ariya vôhârâ, c’est-à-dire « quatre pratiques ou habitudes respectables, » qui sont l’aversion pour le mensonge, pour la médisance, pour un langage grossier, pour les vains discours. D’un autre côté on compte quatre pratiques ou habitudes non respectables, anariya vôhârâ, qui sont l’action de dire qu’on a vu ce qu’on n’a pas vu, celle de dire qu’on a entendu ce qu’on n’a pas entendu, qu’on a pensé à ce à quoi on n’a pas pensé, qu’on a compris ce que l’on n’a pas compris. À ces quatre pratiques condamnables on en oppose quatre nouvelles, qu’on nomme ariya vôhârâ, « les quatre pratiques respectables, » savoir, l’action de ne pas dire qu’on a vu ce qu’on n’a pas vu, qu’on a entendu ce qu’on n’a pas entendu, qu’on a pensé à ce à quoi on n’a pas pensé, qu’on a compris ce qu’on n’a pas compris. Ces deux énumérations opposées sont suivies de quatre nouvelles pratiques non respectables, savoir, l’action de dire qu’on n’a pas vu ce qu’on a vu, et ainsi des autres pratiques auxquelles répondent quatre autres habitudes respectables ou Ariya, qui consistent à dire qu’on a vu ce qu’on a vu, et ainsi de suite. Il est clair que ces énumérations sont des développements scolastiques de la double catégorie du mensonge et de la véracité.

De ces diverses comparaisons il faut conclure que ces énumérations si nombreuses d’attributs moraux et intellectuels qui constituent un des caractères du Buddhisme, se trouvent à des degrés de développement plus ou moins élevés dans les livres qui passent pour les plus rapprochés de la prédication de Çâkyamuni. Tantôt le fond emporte la forme, et les objets qui plus tard devront se classer sous des catégories distinctes, sont exposés un peu confusément ; c’est ce qui arrive pour l’indication des vertus morales qui forme l’un des trois éléments du Sâmañña phala. Tantôt la forme prend le dessus, et la classification paraissant en relief, laisse dans l’ombre le fond, sans doute parce que l’on sait qu’il est connu d’ailleurs ; c’est ce qui arrive pour les énumérations du Sag̃gîti, qui, à quelques exceptions près, ne nous donnent rien de plus que les termes mêmes dont elles se composent. Cela se comprend sans peine, surtout pour ce qui touche ce dernier Sutta, où l’orateur, Çâriputta, a le dessein formel d’énumérer sommairement en présence des Religieux la série des devoirs sur lesquels il n’est pas possible qu’il y ait parmi eux le moindre dissentiment. Mais quelque simple que ce fait paraisse, il avait besoin d’être signalé, parce qu’il explique, en partie du moins, l’origine de ces catalogues d’étendue diverse, dont on a un modèle dans le Vocabulaire pentaglotte des Chinois. Ce n’est pas assez dire que d’attribuer ces catalogues et au besoin d’imiter les recueils disposés par ordre de matières qui sont les bases les plus anciennes et les plus authentiques de la lexicographie indienne, et à la nécessité de réunir en un même corps d’ouvrage des listes de nature très-diverse, afin de pouvoir les retrouver aisément à un moment donné. Il est certain maintenant que les prédicateurs buddhistes avaient de bonne heure rassemblé de pareilles listes, qui se trouvaient naturellement extraites de l’enseignement plus développé