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Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/207

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faux zèle. Mais il n’y a rien dans ce monde qui ne laisse quelque chose à désirer ; nous voyons moins d’honnêtes gens que d’habiles, plus de bon sens pour les affaires que de délicatesse dans les conversations.

Les dames y sont dans les conversations, et les hommes ne trouvent pas mauvais qu’on les préfère à eux ; leur compagnie peut faire l’amusement d’un honnête homme, et est trop peu animée pour en troubler le repos. Ce n’est pas qu’il n’y en ait quelques-unes d’assez aimables ; j’en connois dont la douceur vous plairoit, où vous trouveriez un air touchant propre à inspirer des secrètes langueurs ; j’en connois qui ont de la bonne mine, le procédé raisonnable et l’esprit bien fait ; le commerce en est satisfaisant, mais il n’y a rien à espérer davantage, ou pour leur sagesse, ou par leur froideur, qui leur tient lieu de vertu de quelque façon que ce soit. On voit en Hollande un certain usage de pruderie quasi généralement établi, et je ne sais quelle vieille tradition de continence, qui passe de mère en fille comme une espèce de religion. À la vérité on ne trouve pas à redire à la galanterie des filles, qu’on leur laisse employer bonnement, avec d’autres aides innocentes, à leur procurer des époux. Quelques-unes terminent ce cours de galanterie par un mariage heureux ; quelques malheureuses s’entretiennent de la vaine espérance d’une condition, qui se diffère toujours et n’arrive jamais. Les longs amusemens ne doivent pas s’attribuer, ou je me trompe, au dessein d’une infidélité méditée. On se dégoûte avec le temps, et un dégoût pour la maîtresse prévient la résolution bien formée d’en faire une femme. Ainsi, dans la crainte de passer pour trompeurs, on n’ose se retirer quand on ne peut pas