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Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/238

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suis persuadé de ce que je viens d’alléguer, c’est qu’assurément elle en verra bientôt les effets, et, si mes vœux sont exaucez, le temps en sera court. Et je demande à Votre Altesse Royale, comme ce sera une chose que tout le monde saura tôt ou tard, que je sois le premier qui ait l’honneur de l’apprendre. — Quoi ? interrompit la princesse. — Celui, poursuivit monsieur de Lauzun, pour qui de tous vos soupirants Votre Altesse Royale aura plus de penchant de tous ceux de la Cour, ou bien hors du royaume. Tout le monde le saura un jour, et l’apprendra avec un plaisir extrême ; et comme je suis infiniment plus à vous que le reste des hommes, c’est par cette seule raison que je demande la préférence à Votre Altesse Royale ; afin que, votre belle bouche m’ayant annoncé celui qu’entre les hommes elle veut rendre le plus heureux, je sois le premier aussi à vous en féliciter et à vous en témoigner la joie que j’aurai quand je verrai approcher le moment qui vous doit donner celui que vous aurez honoré de votre choix et que vous aurez trouvé digne de votre affection [1]. »

  1. M. de Lauzun ne pouvoit douter des sentiments de Mademoiselle ; toute la conduite de cette princesse les lui montroit assez, et elle s’étoit même déjà expliquée à ce sujet d’une manière fort claire avec madame de Nogent, sœur du comte : «… Le dimanche venu, je causois avec madame de Nogent, chez la Reine ; je lui avois parlé si souvent et lui avois tenu tant de discours qui avoient rapport à M. son frère, qu’il ne se pouvoit pas faire qu’elle n’eût pénétré mes intentions… Ce jour-là, je lui disois : « Vous seriez bien étonnée de me voir dans peu mariée ? J’en veux demander, lui dis-je, la permission au Roi, et l’affaire sera faite dans vingt-quatre heures. » Elle m’écoutoit avec une très grande attention. Je lui dis : « Vous pensez peut-être à qui je me