Aller au contenu

Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/249

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

vous rendre mes très humbles respects. Et je bénirai toute ma vie ce premier moment où j’ai été assez heureux pour faire que la Cour n’allât pas sans vous. Oui, Mademoiselle, et j’ai travaillé avec chaleur et avec empressement, parce que ma charge et les étroites obligations que j’ai à mon Roi m’obligent de le suivre partout ; et Votre Altesse Royale demeurant ici, c’étoit m’arracher à moi-même que de m’éloigner d’où elle auroit demeuré. Je vous demande mille pardons, Mademoiselle, si je vous parle si librement et si j’en ai agi ainsi sans votre permission ; mais j’ai cru qu’en me servant je ne vous désobligerois pas, et que vous ne seriez pas fâchée d’aller avec un Roi qui vous aime tendrement, qui me l’a fait connoître par les discours les plus passionnés et les plus sincères du monde. — Non, je n’en suis pas fâchée, reprit cette belle, et, bien loin de cela, je veux vous remercier, comme d’une chose qui m’est fort agréable. Et pour vous parler franchement, cette indifférence que je vous ai témoignée ce matin pour ce voyage a été en partie pour voir si vous étiez aussi fort dans mes intérêts que vous le dites, et si vous pouviez me quitter sans peine : car je savois bien qu’ayant autant d’attache que vous témoignez en avoir pour moi depuis si longtemps, et ayant l’esprit que vous avez, vous ne manqueriez pas de tenter quelque chose pour cela, et je me promettois même que vous y travailleriez sérieusement, et que l’accès libre que vous avez par-dessus tous les autres auprès du Roi vous feroit agir avec honneur ; et je ne sais pas même, si vous en aviez agi autrement, si j’aurois