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Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/250

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pu vous le pardonner de ma vie. Enfin, je vous remercie, et souvenez-vous que je n’oublierai jamais ce service ; vous en verrez des preuves peut-être plus tôt que vous ne l’espérez, et qui vous surprendront assez pour vous faire connoître que vous ne vous êtes pas attaché à une ingrate, mais à une personne qui mérite peut-être les soins que vous lui donnez. »

Voyez, de grâce, ce que c’est quand une fois le bonheur nous en veut : tout ce que nous faisons et entreprenons réussit à notre avantage. M. le comte de Lauzun avoit tellement le vent en poupe, comme l’on dit, que non seulement tout lui réussissoit à merveille, mais encore ce qu’il faisoit pour lui seul lui faisoit mériter des sentiments de reconnoissance tout extraordinaires ; et vous eussiez dit, à entendre parler Mademoiselle, qu’elle lui étoit obligée de tout ce qu’il entreprenoit pour son intérêt propre, comme si c’eût été pour elle-même. Le voilà donc content autant qu’un homme qui a un grand dessein, et qui se voit en état de tout espérer, le puisse être. Il tente tous les moyens que son génie lui suggère, tout lui est favorable. Enfin il n’a plus qu’une démarche à faire ; encore est-il en trop beau chemin pour s’arrêter. Il semble même que, n’osant pas se découvrir comme il le souhaitoit, cette princesse, pour partager, pour ainsi dire, les peines de cette dure violence, qu’elle est obligée de lui faire souffrir ; cette princesse, dis-je, qui voit dans ses yeux et dans toutes ses actions, et qui croit découvrir et pénétrer le favorable motif qui le fait agir, le met souvent en train pour