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Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/329

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Le chevalier de Fosseuse ne fut pas longtemps sans aller consoler madame de Bagneux du divertissement dont il étoit cause qu’elle se privoit. Il la trouva avec des charmes infinis, et en un état de beauté qui ne convenoit en aucune manière à une personne qui eût été le moins du monde malade. Il la remercia de la grâce qu’elle lui avoit accordée, et, se croyant asseurés de n’être point interrompus, leurs cœurs s’expliquèrent avec plus de liberté, et ils goûtèrent une véritable joie de pouvoir avoir une conversation aussi longue et hors de toute appréhension.

Cependant le baron de Villefranche, par l’incommodité du lieu, ou par sa propre disposition, se trouva mal peu de temps après que la marche fut commencée. Il tâcha quelque temps de résister, mais, craignant que le mal qu’il sentoit n’augmentât, il jugea qu’il feroit mieux de se retirer avant que d’être incommodé ; et sans en rien dire à personne, de peur de troubler la compagnie avec laquelle il étoit venu, il sortit et s’en retourna chez lui.

M. de Bagneux s’aperçut, peu de temps après, qu’il s’étoit retiré. Il ne douta plus que madame de Bagneux n’eût feint d’être malade pour donner lieu au baron de Villefranche de la voir, et qu’il n’en avoit pu manquer une si belle occasion après l’avoir si fort espérée, et enfin qu’il ne fût alors auprès de sa femme.

Il ne put être maître de sa jalousie ; il sortit sans prendre congé de personne, transporté de rage et de fureur, et arriva à son logis dans des résolutions épouvantables.