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Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/385

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Lauzun affectoit en s’excusant, elle lui dit mille injures, et fit comprendre à tous ceux qui étoient là qu’on ne pouvoit tant s’emporter contre un homme sans en avoir d’autres raisons. M. de Lauzun, qui avoit intérêt de conserver sa réputation parmi les dames, laissa évaporer son ressentiment en reproches, sans y vouloir répondre que par des soumissions et des excuses ; et les dames qui étoient là s’étant mêlées de les accommoder, la princesse de Monaco fut obligée de s’apaiser, pour ne leur pas donner à connoître clairement que son chagrin procédoit d’ailleurs [1].

La princesse de Monaco ayant ainsi perdu son amant et n’ayant fait que tâter, s’il faut ainsi dire, du grand Alcandre, elle chercha à s’en consoler par la conquête de quelque autre. Mais, comme son tempérament ne la rendoit pas cruelle, et que son appétit ne lui permettoit pas d’ailleurs de se contenter d’un seul, elle tenta tant de hasards qu’elle y succomba à la fin. Un page beau et bien fait, mais qui couroit tout Paris, à la manière des pages, lui ayant plu, elle voulut voir si elle s’en trouveroit mieux que de quantité de gens de qualité dont elle avoit essayé jusque-là. Mais celui-ci s’étant trouvé malade, il lui communiqua sa maladie, dont ne se faisant pas traiter assez promptement, peut-être pour ne pas savoir d’abord ce que c’étoit, peut-être aussi par la peine qu’elle avoit à se découvrir, elle mourut dans les remèdes [2], faisant voir par sa mort quelle appréhension doivent avoir celles qui l’imitent dans ses débauches.

  1. Saint-Simon fait le même récit (t. 20, édit. Sautelet).
  2. Mme de Monaco mourut en juin 1678. Voy. t. 1, p. 138.