Aller au contenu

Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/419

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

pour soutenir une origine si illustre. Pour ce qui est de sa personne, sa jeunesse, accompagnée d’un je ne sais quoi, la rendoit toute charmante. Ainsi, quoiqu’il ne fût ni de si belle taille ni de si grand air que beaucoup d’autres, il ne laissoit pas de plaire généralement à toutes les femmes : de sorte qu’il ne parut pas plutôt à la cour qu’elles firent toutes des desseins sur sa personne.

La maréchale de La Ferté [1] fut de celles-là, et, trente-sept ou trente-huit ans [2] qu’elle avoit sur la tête ne lui permettant pas d’espérer qu’il la préférât à tant d’autres qui étoient plus jeunes et plus belles qu’elle, elle crut qu’elle ne feroit point mal de lui faire quelques avances, et que les avances pourroient lui tenir lieu de mérite. Comme on jouoit chez elle, et que c’étoit le rendez-vous de tous les honnêtes gens et de tous ceux qui n’avoient que faire, elle pria le duc de Longueville [3] de la venir voir ; et, lui ayant marqué une heure, pour le lendemain, où il ne devoit encore y avoir personne, elle eut le plaisir de

  1. Henri de Saint-Nectaire ou Senneterre, duc, pair et maréchal de France, veuf en 1654 de Charlotte de Bauves, épousa en secondes noces (25 avril 1655) Madelaine d’Angennes de La Loupe, née en 1629 et plus jeune que lui de vingt-neuf ans, qui rendit son nom célèbre. Sœur de la comtesse d’Olonne (voy. I, p. 5), elle se distingua par les mêmes scandales. Elle aura son histoire.
  2. C’est quarante-trois ans qu’il faudroit dire.
  3. Le duc de Longueville, né le 29 juillet 1649, avoit alors près de vingt-trois ans. « Il avoit, dit mademoiselle de Montpensier, le visage assez beau, une belle tête, de beaux cheveux, une vilaine taille. Les gens qui le connoissoient particulièrement disent qu’il avoit beaucoup d’esprit ; il parloit peu ; il avoit l’air de mépriser, ce qui ne le faisoit pas aimer. » (Mém. de Montp., VI, 359.)