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Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/444

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traiter promptement, parce que le mal qu’elle avoit pouvoit devenir pire, si par hasard elle venoit à le négliger.

Cet arrêt étonna la duchesse, qui avoit ouï parler plusieurs fois à son mari de ces sortes de maux, dans lesquels l’expérience le rendoit savant. Ainsi, étant bien aise de savoir si celui qu’elle avoit étoit le plus grand de tous, elle s’en informa du chirurgien. Le chirurgien lui dit que non, mais que, comme il lui avoit déjà dit, il falloit y remédier promptement, sinon qu’il pouvoit le devenir. Comme elle eut entendu cela, elle lui dit qu’elle avoit tant de confiance en lui, sur la réputation qu’il avoit dans le monde, qu’elle s’abandonnoit entièrement entre ses mains ; et se nommant en même temps, elle surprit le chirurgien, qui, sachant qu’il avoit affaire à une personne de la première qualité, fut fâché de lui avoir parlé si nettement. Il lui demanda pardon de ce qu’il s’étoit montré si libre en paroles, s’excusant que comme les plus abandonnées lui tenoient le même langage qu’elle lui avoit tenu, il avoit cru être obligé de lui répondre ce qu’il avoit fait, n’ayant pas l’honneur de la connoître.

La duchesse lui pardonna aisément, à condition néanmoins qu’il la sortiroit [1] bientôt d’affaire ; ce que le chirurgien lui promit si elle vouloit observer un certain régime de vivre. Elle lui dit qu’elle feroit tout ce qu’il lui ordonneroit, et même fit encore davantage : car elle voulut garder le lit tant qu’elle fut dans les remèdes, craignant que si elle continuoit de vivre comme elle avoit

  1. Sortir pour tirer n’étoit pas plus françois alors que maintenant.