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Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/467

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Comme elles virent néanmoins que c’étoit là la volonté de leurs maris, elles s’y laissèrent résoudre ; et pour ne pas s’ennuyer en attendant le dîner, elles dirent à la du Pré de leur faire passer ses religieuses en revue : ce que la du Pré fit, parce que, se doutant bien qu’elles étoient toutes de même confrairie, elle ne vouloit pas désobéir à celles qui méritoient bien d’être les abbesses du couvent.

Cependant la disgrâce de M. L’Avocat duroit toujours ; mais étant arrivé en ce temps-là un malheur au chevalier de Lignerac, (frère de l’abbé de Lignerac), qui avoit été mis en prison à la requête d’un nombre infini de personnes qu’il avoit attrapées, la duchesse de La Ferté l’envoya quérir, et lui dit qu’elle lui pardonnoit pourvu qu’il le fît sortir de prison. L’Avocat, qui savoit l’intrigue de l’abbé et d’elle, trouva bien rude qu’il fallût s’employer pour le frère de son rival, et que sa grâce ne fût qu’à ce prix-là ; mais comme elle l’avoit puni l’autre fois pour avoir dit la vérité, il n’osoit la dire cette fois-là, et il lui promit que, si le chevalier ne sortoit pas de prison, ce ne seroit pas manque d’y employer tout son crédit.

L’Avocat trouva de l’obstacle dans son entreprise ; tous les créanciers du chevalier de Lignerac furent crier aux oreilles des juges [1] et leur ayant fait voir qu’il avoit déjà fait cession de biens, et que depuis ce temps-là il avoit encore emprunté deux cent mille écus, sans avoir jamais eu ni servante ni laquais, les juges firent comprendre

  1. Voy. p. 420.