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Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/481

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faire sa maison. Comme cette demoiselle, bien loin de ressembler à madame de Montespan, dont l’avarice alloit jusqu’à la vilenie, étoit généreuse jusqu’à la prodigalité, il fut obligé aussi de lui donner un homme pour retenir cette humeur libérale [1], et pour prendre garde qu’elle pût subsister avec cent mille écus par mois qu’il lui donnoit. Ce surintendant fut le duc de Noailles [2], dont on fut extrêmement surpris : sa dévotion sembloit incompatible avec un emploi qui le faisoit entrer dans beaucoup de petits détails dont il auroit pu se passer honnêtement. Mais

    juger du martyre que souffre son orgueil, qui est encore plus outragé par la haute faveur de madame de Maintenon. »

  1. Madame de Sévigné parle de cette prodigalité de madame de Fontanges : « Je vous ai parlé de toutes les beautés, de toutes les étrennes ; Fontanges en a donné pour vingt mille écus, sans que la pensée lui soit venue de faire un présent à madame de Coulanges. » (12 janv. 1680.) Dans une autre lettre, où elle parle du voyage que fit mademoiselle de Fontanges avec le Roi, qui alloit au-devant de madame la Dauphine, on lit : « On mande qu’on s’est fort diverti à Villers-Cottrets ; je ne vois pas que les visites à ce carrosse gris (où étoit la favorite) aient été publiques. La passion n’en est pas moins grande. On (c’est-à-dire elle) reçut en montant dans ce carrosse dix mille louis et un service de campagne de vermeil doré. La libéralité est excessive, et on répand comme on reçoit. » (1er mars 1680.)
  2. Anne-Jules de Noailles, fils d’Anne de Noailles et de Louise Boyer, né le 5 février 1650. Après s’être fait remarquer dans plusieurs campagnes, il suivit le Roi à la conquête, de la Franche-Comté en 1674. En 1677, par la démission de son père, il fut fait duc de Noailles et pair de France ; en 1678, il obtint le gouvernement de Roussillon qu’avoit eu son père. Sa faveur étoit donc antérieure à l’emploi qu’il avoit accepté. Marié depuis le 13 août 1671 avec Marie-Françoise de Bournonville, il eut de ce mariage vingt et un enfants.