Aller au contenu

Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/76

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

veut que je m’acquitte d’une commission que je doute qui vous soit agréable ; il n’a pas été en mon pouvoir de m’en dispenser : c’est, Madame, qu’il souhaite que Votre Majesté reçoive mademoiselle de La Vallière [1], qui veut vous rendre ses respects. — Je l’en quitte, répliqua la Reine, il n’est pas besoin. — Si j’osois, ajouta madame de Montausier, dire à Votre Majesté que cette complaisance que vous aurez pour le Roi le touchera sans doute, et qu’au contraire votre refus l’aigrira ; enfin, Madame, si le Roi aime cette fille, votre froideur pour elle ne le guérira pas : ainsi Votre Majesté feroit quelque chose de plus glorieux pour elle si elle vouloit surmonter cette petite répugnance qui s’oppose aux volontés du Roi, et si elle vouloit suivre l’exemple de tant d’illustres femmes qui en ont dignement usé avec ce que leurs maris aimoient. — Mais, Madame, interrompit la Reine, le moyen de voir cette fille ! j’aime le Roi et le Roi n’aime qu’elle. » Le Roi, qui étoit aux écoutes, entra brusquement ; sa vue surprit si fort la Reine qu’elle en rougit et saigna du nez, de manière qu’elle se servit de ce prétexte pour sortir. Trois jours après elle accoucha d’une petite Moresque velue qui pensa la faire mourir [2]. Toute la cour fut en prières ; la Reine-Mère fondoit en larmes auprès de son lit ; le Roi en parut triste, mais il ne discontinua

  1. Sans doute à l’occasion de la nouvelle année. C’étoit le 31 décembre 1666. Voy. la note suivante.
  2. Nous sommes maintenant en 1667. Le 2 janvier de cette année, la reine eut une fille, qui porta son nom, Marie-Thérèse, et mourut le 1er mars 1672. — Qu’elle fût noire et velue, nous ne trouvons pas ailleurs ce renseignement.