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Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/77

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point de voir La Vallière en secret, et de lui donner mille et mille marques de son amour. Cependant la jeune Reine le pria, en présence de sa mère et de son confesseur, de vouloir marier La Vallière ; le Roi, qui ne sçauroit être fourbe, ne put se résoudre à le leur accorder, et ne leur fit que dire, tout interdit, que si elle vouloit il ne s’y opposeroit pas, et qu’ils pouvoient lui chercher parti. Ils pensèrent à monsieur de Vardes, comme l’homme de la cour le plus propre à se faire bien aimer ; mais de Vardes étoit amoureux à mourir de madame de Soissons : ainsi, quand on lui en parla, il se mit à rire, disant qu’on se moquoit, qu’il n’étoit pas propre au mariage. Madame [1], qui savoit la passion de Vardes pour madame de Soissons, alla voir la Comtesse, comme la plaignant si son amant consentoit à ce mariage, et lui offroit ses services en cette occasion, en le faisant détourner par le comte de Guiche, intime ami du marquis. Voilà nos deux admirables qui lient une grande amitié et s’ouvrent leurs cœurs de leurs amours. Vardes vint voir la comtesse, à laquelle il fit valoir le refus de La Vallière avec un million : « car, lui dit-il, ce n’est point par délicatesse, je me moque de son commerce avec le Roi ; feu le comte de Moret mon père, qui étoit un des plus honnêtes hommes de France, épousa bien une des maîtresses de Henri IV, de laquelle je suis sorti :

  1. Henriette d’Angleterre, femme de Monsieur, frère du Roi, dont on lira plus loin les intrigues avec le comte de Guiche. Elle étoit fort jalouse de La Vallière, parce que, quand le Roi avoit commencé à aimer celle-ci, il avoit feint de la rechercher elle-même.