Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/448

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ne lui donnoit point d’envie de se marier ; que leurs femmes portoient le haut de chausse, et qu’il ne leur étoit pas permis de coucher avec elles quand ils vouloient.

Ventadour, écumant de la bouche comme un cheval qui se joue de son mors, se trouva choqué de ces paroles, et lui répliqua que, s’il ne couchoit pas avec sa femme, c’étoit parce qu’il en avoit de plus belles. Mais Biran lui contredisant tout exprès, il le mit tellement en colère, qu’il jura qu’il ne seroit pas plutôt chez lui qu’il lui passeroit son épée au travers du corps, ou qu’elle lui obéiroit. Pour ce qui est du duc de La Ferté, il n’avoit pas été si longtemps sans faire paroître son extravagance ; il avoit déjà tiré tout ce qu’il portoit, et, l’ayant montré à la compagnie, il dit qu’il vouloit qu’on le lui coupât s’il ne faisoit son devoir dès qu’il seroit arrivé à sa maison. C’étoit un plaisir de voir la passion de ces deux hommes, qui étoient aussi fous l’un que l’autre ; mais ce qui étoit encore plus plaisant, c’est que Biran et Roussi faisoient mine de n’en vouloir rien croire. En quoi celui-ci jouoit d’autant mieux son personnage qu’il espéroit qu’une pareille action l’alloit mettre au comble de la joie.

Ils quittèrent ces deux ducs en leur faisant ainsi la guerre, de quoi ceux-ci étant encore tout remplis en arrivant chez eux, ils montèrent d’abord dans la chambre de leurs femmes, où ils débutèrent par des juremens. La duchesse de La Ferté, qui, en conséquence des avis que Biran avoit donnés à Tilladet, avoit été avertie par lui de tout le manège, fit semblant de trembler à sa voix, et, quoique son ordinaire fût de parler