Page:Côté - Bleu, blanc, rouge, 1903.djvu/104

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marguerites, après avoir bu la rosée au calice des violettes. Et les marguerites, et les violettes, n’en vivent pas moins leurs destin de fleurs !

Pourquoi donner tant d’importance aux brûlantes déclarations des jouvenceaux qui te font sauter tout un soir dans leurs bras ? Ont-ils plus de tête et plus de cœur qu’un papillon ? Je n’oserais le certifier : j’ai tant vu de larmes qu’ils ont fait couler, ces pauvres étourdis, sans se douter seulement de leur imprudence.

Mais j’ai vu aussi des petites filles se faire du mal elles-mêmes, et prendre pour des aveux les procédés les plus élémentaires de la galanterie. C’est peut-être une des causes de la désertion des salons par les jeunes gens qui n’osent s’aventurer sur un terrain si brûlant, avec la terreur continuelle de voir leur liberté engagée par quelque parole imprudente, habilement provoquée.

Non, il faut rire, batifoler avec ces beaux cavaliers ; applaudir aux jolies choses qu’ils déclament, mais ne pas se laisser prendre à l’emphase, à la passion de leur pantomime, pas plus qu’au tremblement de voix d’un chanteur d’opéra. Apprenez l’escrime, vous aussi ; ripostez en tierce, en quarte, aux attaques de ces habiles jouteurs. Inventez quelque botte secrète. Trouvez le défaut de la cuirasse ; enfoncez y la dague à votre tour. Et si le jeu vous amuse, recommencez tous les soirs pendant toute une saison. Mais, de grâce, ne cherchez pas l’amour sous les lustres ; c’est un enfant de la nature qui court les bois et les champs. Il vous a frôlée parfois de son aile, qui sait, et vous avez passé outre, le trouvant trop mal habillé.