Page:Côté - Bleu, blanc, rouge, 1903.djvu/153

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ler par cet ange-colombe une impression de fraîcheur, émanant sans doute de l’âme innocente, à peine feuilletée comme le blanc missel de première communion qu’elle porte à la main. Quand l’ingénue s’abîme dans une longue prostration, il me semble voir sur le prie-Dieu de la voie lactée les séraphins du paradis s’incliner dans un même acte d’adoration.

Mais, par contre, je n’aime pas voir des évaporées en toilettes tapageuses, et des coquettes hypocrites s’asperger d’eau régénératrice, avec l’unique souci, les premières de faire bouffer leur jupe de faille et craquer la soie du corsage, les secondes, de se faire une réclame, un attrape-nigaud de leur dévotion.

Rien n’égale, on le sait, la poésie du culte catholique. La prière des fidèles réunis portée au ciel sur le véhicule d’un nuage d’encens, les sonorités harmonieuses de l’orgue mêlées aux voix humaines, les habits constellés d’or et de pierreries des officiants, l’autel où rayonne l’ostensoir lumineux, semble un nouveau Sinaï, resplendissant des splendeurs de la divinité cachée. Je souffre encore de ne pas voir l’assemblée entière abîmée dans l’extase, en une commune pensée de poétique amour. J’enrage d’entendre des rires étouffés, des parodies burlesques mimées par de grossiers personnages qui croient en outre remplir un devoir de salubrité publique en se ramonant le gosier et l’appendice nasal, troublant de leurs nasillardes trompettes l’harmonie du saint lieu. D’autres s’amusent à saliver sur les belles robes des dimanches, comme la limace bave sur les roses : plaisir de souiller.

Ce qui me met encore hors de mes gonds, c’est de constater que la gent argentée a si peu de respect pour les déshérités du sort. Dans le temple, au moins, ces derniers devraient avoir les honneurs dus à leur misère.

Quand je vois de gros parvenus se prélasser seuls dans des bancs à quatre places, alors que de pauvres