Page:Côté - Bleu, blanc, rouge, 1903.djvu/193

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la chaire des professeurs, le tribunal du juge, les gouvernements et la société. L’amour du luxe prend des proportions inconnues de Babylone, de Rome et de Carthage. C’est une prodigalité d’ameublements, de dépenses, de toilettes inouïes.

Les campagnes, elles-mêmes, n’échappent pas à cette fièvre : les beaux chevaux, les waggines vernies, les chapeaux à plumes, les robes de soie, des enfants de nos cultivateurs mangent en quelques années la terre des ancêtres. Forcés de prendre le chemin de l’exil, ces malheureux vont expier leur prodigalité insensée, leurs manœuvres frauduleuses, dans quelque filature de coton, loin du clocher de leur village et de tout ce qu’ils ont aimé !

Telle petite femme d’avocat ou de bureaucrate veut imiter l’épouse de ce gros banquier dont elle est l’amie. Il lui faut servante, maison de campagne et jour de réception. Le pauvre mari, pour couvrir ces folles dépenses, se voit parfois forcé de renier tout un passé d’honneur, et d’entacher un nom, jusqu’alors respecté, en trempant ses mains dans des affaires louches.

Ces spéculations hardies, ces jeux de bourse, où les plus habiles s’entendent pour tromper les autres. On voit les petites fortunes se briser en voulant imiter les grandes.

C’est une presse vénale, hypocrite, qui bâillonne ses reporters, met une sourdine à son indignation, à son besoin malsain de sensations, pour voiler les hontes des riches, les turpitudes des princes de la finance, les tragédies sanglantes, dont « la garde qui veille aux barrières du Louvre n’en défend pas nos rois. »

Au foyer, n’est-il pas évident que le niveau moral baisse constamment ? Le père a-t-il toujours l’autorité divine, que donne la haute valeur morale ? La femme, poussée au mariage par le désir de l’émancipation et du