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PRÉEXISTENCE


J’ai vague souvenir d’antiques existences,
Où le reflet pâli des vieux siècles lointains,
S’efface jour par jour, éphémères fusains
Dont le dessin se brouille au moment des naissances.

J’ai transmigré jadis sous d’impalpables formes :
Atôme lumineux, nouveau-né des soleils :
Sur mon berceau d’azur tressé de fils vermeils
Un long voile lacté couvrait mes traits informes.

Oui, j’ai vécu toujours en la vie infinie,
Ainsi que dans la mer roule la goutte d’eau,
Au ciel d’hier succède un rivage nouveau
Je retourne à la mer, ma première patrie.

J’ai souvenance encor quand le doute m’oppresse
Du chaos primitif, d’où mon être est sorti :
La terre était si triste aux jours d’Adonaï
Si blême le soleil, si lourde la détresse.