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la terre ancestrale

sanglotaient. Hubert était parti pour le village. Dans cette demeure hier encore si joyeuse, où, depuis près de trois siècles, les seules ombres n’avaient été que le départ de fervents chrétiens pour le ciel, le premier véritable deuil était apparu : le deuil de toute une race, la fin d’une lignée de maîtres du même sol.

Pendant les quelques jours qui suivirent, le père ne parla pas de départ à son cadet. Il le savait digne fils de lui-même par son entêtement. Aussi il ne désirait pas recommencer une discussion inutile et au cours de laquelle il craignait que sa colère ne l’emportât trop loin. Il ne voulait pas non plus risquer ses dernières chances, car il conservait encore un espoir, il comptait sur un suprême appui : son curé. Le curé, l’homme écouté plus que tout autre dans nos paroisses canadiennes ; celui que l’on consulte dans toutes les circonstances difficiles, qui apporte un remède à tous les maux, ne fut-ce que la consolation. En secret, Jean Rioux avait consulté son pasteur qui lui avait répondu :

— Ne lui dis rien et amène-le moi ; je ferai mon possible pour t’assister. En attendant, prions Dieu et fais prier les femmes ; je crois qu’elles sont mieux écoutées que nous.

— Je pense, monsieur le curé, qu’il n’est pas nécessaire