Page:Cabanès - Grands névropathes, Tome III, 1935.djvu/106

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

si on le surprenait dans cette chambre qu’on ne voulût l’empêcher d’y revenir, il baisa à la hâte les lèvres de sa sœur et se retira avec précaution[1]. »

Longtemps après, quand il contemplait les nuages, ceux-ci lui apparaissaient comme des rangées de petits lits, à rideaux blancs, dans lesquels étaient couchés « des enfants malades, des enfants mourants, qui s’agitaient avec angoisse et pleuraient à grands cris pour avoir la mort » !

Sa mélancolie native, son amour de la solitude s’accusèrent davantage chez l’enfant après qu’il eût perdu son père. Tout le long du jour, nous confie-t-il, il cherchait, dans le jardin attenant à la maison habitée par ses parents ou dans les champs qui l’avoisinaient, les coins les plus silencieux, les plus secrets.

Sa mère, hautaine et froide, n’essayait pas de pénétrer le mystère de cette âme inquiète qui, repliée sur elle-même, se serait, d’ailleurs, difficilement livrée.

« Ce marmot à grosse tête, toujours solitaire ou toujours pensif » n’avait de passion que pour le merveilleux ou pour les aventures extraordinaires. Le malheur est qu’il voulut les vivre. Comme son frère le pirate, il s’enfuit du logis familial, avec un

  1. Baudelaire, Les Paradis artificiels.