Page:Cabanès - Grands névropathes, Tome III, 1935.djvu/110

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plus pénibles. Chaque mouvement respiratoire provoquait de l’angoisse.

Il guérit aussi brusquement qu’il était devenu malade : une nuit, il ressentit tout à coup une sensation bizarre, qui partait des genoux, puis tout rentra dans l’ordre ; ses oppressions cessèrent et sa douleur morale disparut du même coup. Depuis lors, il perdit tout souvenir de la petite fille de Wordsworth. Mais son obsession avait changé seulement d’objet.

Sa vie se passe, désormais, dans des transes presque continuelles : son cerveau est assailli par de multiples phobies. En 1818, il est mordu par un chien : on ne peut lui ôter de l’idée que l’animal fût atteint de la rage ; pendant plusieurs mois il ne put se livrer à aucun travail, l’esprit occupé par cette hantise qu’il n’arrivait pas à chasser.

Plus tard, ce sont trois spectres qui se dresseront sans cesse devant lui : celui de la folie, « qui le balançait sur une balançoire, d’une hauteur à toucher les nuages » ; celui de la mort volontaire, qui ne lui répugnait pas ; quant au troisième…, nous comprenons mal aujourd’hui cette terreur morbide, mais au temps où vivait Quincey on croyait à la combustion spontanée, et cette pensée qu’il pouvait se consumer en faisant explosion, et ne laissant qu’un débris de cendres, remplissait d’effroi ce nosophobe exaspéré.