Page:Cabanès - Grands névropathes, Tome III, 1935.djvu/142

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de la peine et de la souffrance sous toutes ses formes. Son attitude même le montre… Ses yeux ont une espèce d’anxiété impuissante… Je l’estime un homme d’un grand génie, sans utilité, un homme étrange, pas du tout un grand homme. »

Carlyle avait-il vu Coleridge dans de mauvais jours ? On peut, à la rigueur, le supposer ; mais nous savons, d’une autre source, que ce dernier avait « les yeux égarés, la physionomie blême, la démarche hésitante, la main tremblante et le corps en déroute ». Comme tous les opiomanes chroniques, il ne travaillait plus, ou du moins ne produisait que des œuvres de courte haleine, sans lien et sans méthode. Vieilli avant l’âge, — il avait les cheveux blancs à quarante-deux ans — Il était physiquement et moralement déchu. La ruine de son intelligence, l’affaissement de sa volonté, la perte de son souffle poétique, voilà ce qu’avait gagné Coleridge à l’usage de la drogue néfaste ; mais avant d’être opiophage, il convient de ne pas oublier que Coleridge fut un « déséquilibré, doublé d’un psychopathe », et que son funeste penchant est étroitement lié à sa psychopathie.

Chez lui, l’opium n’a rien créé, pas même une maladie mentale. Né d’un père « pathologiquement original », il avait un terrain tout préparé pour la psychose dont nous avons déroulé les étapes successives. Sa toxicomanie a-t-elle eu sa cause pri-