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chait entre les crises jusqu’à peu à peu se lasser complètement.



Photo Nadar
GEORGE SAND ÂGÉE
(Collection de l’auteur)

Quelques infidélités passagères de Chopin donnèrent à son amie le prétexte d’un roman où il ne jouait pas le beau rôle, selon le même procédé qu’elle avait employé pour se venger de Musset : Lucrezia Floriani est un pendant d’Elle et Lui, avec moins de talent.

Chopin en fut profondément affecté. Il quitta Nohant pour n’y plus retourner. Il ne devait pas se relever de ce dernier coup.

Incurable en sa mélancolie, anéanti dans le regret de l’idéal évanoui, replié de plus en plus sur ses amours défuntes, il ne fera plus désormais que cultiver sa douleur et saura lentement mourir du sentiment qui jusque-là l’aidait à vivre. « Son amour était devenu sa vie et, délicieux ou amer, il ne dépendait plus de lui de s’y soustraire. »

Ses tourments moraux, le dépérissement de ses forces physiques, les meurtrissures de son cœur, se trahissent dans les dernières œuvres que l’immortel artiste exhale comme un cri suprême de détresse. Il semble, comme on l’a observé, qu’à ces conceptions « manque parfois le souffle et l’air des vivants, comme si sa poitrine eût été faite pour une sphère plus raréfiée que la nôtre ». Les sonates qu’il composa vers la fin de sa vie ont « quelque chose de fiévreux, de morbide, de fantastique : c’est