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C’est Mérimée qui a révélé à la France le nom de Gogol, jusqu’à lui resté à peu près inconnu ; mais l’auteur de Carmen n’avait d’autre dessein que de nous faire connaître une rareté littéraire. Aujourd’hui nous exigeons davantage, et notre curiosité s’attache autant qu’à l’homme à la race dont il est issu.

L’écrivain, consacré par les suffrages de ses compatriotes, nous apparaît, pour employer le langage magnificent de M. de Vogüé, « comme un gardien à qui tout un peuple a confié son âme pour un moment[1] ». C’est le secret de l’âme russe que nous chercherons à travers celui qui s’est efforcé à l’exprimer, à nous en communiquer les moindres vibrations.

Chez Gogol se retrouvent les qualités et les défauts de la nation à laquelle il appartient : « Mélange contradictoire de tristesse et de gaieté, de mélancolie et d’enjouement ; d’idéalisme s’exagérant jusqu’à la fantaisie et même au fantastique, mais aussi de réalisme retombant jusqu’à la grossièreté vulgaire et même à la trivialité[2]. »

Si le fond du caractère russe est la mélancolie, allant parfois jusqu’à un pessimisme confinant à

  1. Le Roman russe. Paris, 1916.
  2. Nicolas Gogol, écrivain et moraliste (thèse de doctorat ès lettres de l’Université de Lyon, par Mlle Raïna Tyrneva. Aix, 1901).