Page:Cabanès - Grands névropathes, Tome III, 1935.djvu/256

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En sa qualité de Petit-Russien, Gogol s’est senti de bonne heure attiré par le surnaturel ; il l’effrayait et le charmait à la fois.

Ses premières nouvelles accusent cette tendance au fantastique, au diabolique. Satan en est, le plus souvent, le héros principal, Satan ou un de ses suppôts. Les sorcières jouent également leur rôle dans ces récits ; mais celles-ci ne se cachent pas sous les traits de bêtes immondes et répugnantes ; ce sont de gracieuses ondines aux longs cils, aux yeux clairs et perçants, aux épaules et aux jambes arrondies et fermes, ces sirènes du Nord à la voix enchanteresse, d’autant plus dangereuses qu’elles ont plus de séduction. Sorcellerie naïve peut-être, mais qui est comme « l’hommage craintif, et touchant dans ses craintes, que rendent ces âmes barbares à l’éternel pouvoir de la beauté et de l’amour[1] ».

Le conte intitulé Viy, qui a été traduit dans notre langue sous le titre : Le roi des Gnomes[2], et le roman épique Tarass Boulba, sont : le premier,

  1. Ern. Dupuy, Les grands maîtres de la littérature russe : Nicolas Gogol. Paris, 1897.
  2. C’est le nom que l’on donnait, dans la Petite-Russie, au chef des Gnomes, au roi de ce peuple de génies souterrains, qui président à la terre et aux métaux, comme les Sylphes à l’air, les ondines à l’eau, les salamandres au feu. On croit que le regard du Viy est mortel pour tout homme dont les yeux rencontrent les siens. L. Viardot, op. cit.