Page:Cabanès - Grands névropathes, Tome III, 1935.djvu/300

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Les Oblomov sont légion dans la nation russe ; d’autres auteurs, tels que Krylov, Gogol lui-même, nous ont révélé l’oblomoverie ; mais celle-ci se trouve plus amplement développée, est incarnée dans le type créé, définitivement consacré par Gontcharov, qui a su le présenter dans toute sa plénitude, dans toute sa vérité. Celui-ci n’a eu qu’à se regarder vivre pour fixer les principaux linéaments de son œuvre capitale. Tel il se révèle dans sa correspondance intime, tel on se le figure d’après son roman.

« Où que je suis, tout m’ennuie et je ne sais que faire de ma personne », écrivait-il à sa sœur aux approches de la soixantaine. Et de retour à Pétersbourg, après une absence d’assez longue durée, il reprenait l’antienne :

« Pourquoi suis-je parti et pourquoi suis-je revenu ? Je m’interroge et ne sais que répondre. Parti pour rien et revenu de même, disait ma mère, je ne sais plus à quelle occasion, c’est aussi ce que je puis dire de moi. »

Un autre jour, il se déclare las de voyager, fatigué de déplacements pour le moins inutiles.

« On peut aller d’ici à Paris en trois jours, mais je ne veux pas de Paris ; j’en ai assez. Et d’ailleurs, je connais trop l’étranger à présent ; rien de nouveau m’y attend. »

L’état médiocre de sa santé aggrave le spleen