Page:Cabanès - Grands névropathes, Tome III, 1935.djvu/299

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roman, nous allions écrire dans l’autobiographie de Gontcharov, sous les traits d’un Allemand, venu de bonne heure chercher fortune en Russie, élevé par son père à l’anglo-saxonne et qui est le type du self made man, brasseur d’affaires, homme d’action, pour tout dire, qui est tout juste l’opposé de ce qu’est l’homme de rêve, l’homme d’impuissance, incapable de réagir et qui est en train de tomber dans la somnolence et l’apathie.

Oblomov est, selon l’heureuse expression de M. André Mazon, qui a consacré à Gontcharov un travail des plus remarquables, Oblomov est plus que le type d’une classe et d’une époque, c’est un type ethnique. Le mal dont il souffre est un mal russe.

Les causes de ce mal sont assez obscures, mais le climat et l’alimentation sont pour beaucoup dans son étiologie. « Le froid devient déprimant, dès qu’il atteint un degré trop bas ou une trop longue durée. Il peut alors disposer à une certaine indolence physique et morale, à une sorte de passivité du corps et de l’âme. La masse de la nation a, durant des siècles, été condamnée à un régime maigre, presque entièrement végétal. Sous un climat du Nord, elle a vécu comme un peuple du Midi[1]. »

  1. Anatole Leroy-Beaulieu, L’Empire des Tsars et les Russes. Paris, 1890, t. I.