Page:Cabanès - Grands névropathes, Tome III, 1935.djvu/362

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la façon la plus positive, qu’une maladie qui dure depuis vingt-quatre ans, a dû forcément laisser des traces. » Et il précise :


« Quand on m’eut emmené à l’étranger, dans les différentes villes d’Allemagne où nous passions, je me bornais à regarder en silence et, je m’en souviens, je ne faisais même aucune question. Je venais d’avoir une série d’accès très violents. Or, chaque retour de ces attaques, chaque recrudescence de ma maladie avait pour effet de me plonger ensuite dans une hébétude complète. Je perdais alors toute mémoire, l’esprit travaillait encore, mais le développement logique de la pensée était, pour ainsi dire, interrompu. Je ne pouvais pas lier l’une à l’autre plus de deux ou trois idées… »


Dans l’intervalle des crises, tous les épileptiques de Dostoïevsky présentent des troubles mentaux. Chez le prince Mychkine, l’épilepsie aboutit à la débilité, puis à la déchéance mentale.

Kiriloff a des insomnies persistantes ; il a des crises d’angoisse : ces insomnies, pour le médecin légiste, sont l’indice d’une aliénation mentale en puissance. Chez Kiriloff, Dostoïevsky a montré, en outre, « l’idée de Dieu, spécifique de l’épilepsie », état que les Allemands ont spécialement décrit (Gottnomenklatur).

Smerdiakoff présente une capacité mentale très réduite ; il est incapable de toute mission sérieuse, de toute continuité d’effort, d’une organisation de sa conduite[1].

  1. Loygue, Th. cit., 143 et suiv.