Page:Cabanès - Grands névropathes, Tome III, 1935.djvu/41

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Dans sa jeunesse, il avait suivi les cours d’Hegel, et il en avait embrassé les maximes :

« J’étais jeune et fier, dira-t-il plus tard, à l’heure des confessions, et je me sentais flatté d’apprendre, par le maître, que le bon Dieu n’était point au ciel, comme le disait ma grand’mère, mais que j’étais Dieu moi-même sur la terre. »

Il prit d’ailleurs vite en dégoût cette doctrine, qu’il n’avait peut-être jamais bien approfondie, et qui ne tarda pas à devenir la cible de ses sarcasmes.

« Un beau soir d’été, conte-t-il, j’étais près d’une fenêtre ouverte, à côté du professeur Hegel. J’avais vingt et un ans, j’avais bien dîné et pris du café, et je parlais avec enthousiasme des étoiles que j’appelais la demeure des élus. Le maître grommelait à côté de moi : « Les étoiles, les étoiles ne sont qu’une lèpre lumineuse du ciel ! » — Mais, pour Dieu, lui dis-je, n’y a-t-il là-haut aucun lieu où la vertu soit récompensée ? Hegel me regarda d’un œil perçant : « Ainsi, dit-il, vous voulez encore qu’on vous donne un pourboire pour avoir soigné votre mère malade et pour n’avoir pas empoisonné votre frère ? »

En 1825, Heine s’était converti au protestantisme ; les règlements l’exigeaient de qui voulait obtenir le titre de doctor juris utriusque. Un moment, le bruit courut de sa conversion au catholicisme ; mais il faut l’entendre raconter les cir-