Page:Cabanès - Grands névropathes, Tome III, 1935.djvu/85

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plier à flatter un maître usé de goutte, irritable et dominateur ; à prodiguer des compliments à milady sa femme et milady sa sœur, sans se sentir jamais apprécié plus qu’un valet. Espoirs déçus, élans paralysés, humiliations constantes et pour couronner le tout, après avoir espéré une situation digne

    neur ; d’ailleurs il peut plutôt supporter une perte que ne le ferait un pauvre marchand.
    « Si vous êtes au service d’un maître à plusieurs domestiques, ne faites jamais rien au-delà de votre tâche particulière ; pour tout le reste, dites : « Ce n’est pas mon ouvrage. »
    « Si vous êtes en faveur auprès de votre maître, faites-lui entendre que vous avez une autre place en vue, et, sur le regret qu’il montrera de vous perdre, dites-lui que certainement vous aimeriez mieux vivre avec lui qu’avec qui que ce fût au monde, mais qu’on ne peut pas blâmer un pauvre domestique de chercher une meilleure condition… que votre ouvrage est dur et vos gages minimes… Sur cela votre maître, s’il a quelque générosité, vous augmentera plutôt que de vous laisser partir ; s’il n’en fait rien, et si en définitive vous tenez à ne point perdre votre place, dites qu’un de vos camarades vous a décidé à rester.
    « Ne venez jamais qu’on ne vous ait sonné ou appelé trois ou quatre fois : il n’y a que les chiens qui arrivent au premier coup de sifflet.
    « Querellez-vous, battez-vous entre domestiques ; mais souvenez-vous toujours que vous avez tous un ennemi commun.
    « Quand vous avez fait une faute, soyez impertinent, et emportez-vous comme si vous étiez l’offensé : c’est souvent le moyen de faire tomber à l’instant même la colère de votre maître.
    « Voulez-vous quitter votre maître sans être obligé de rompre vous-même avec lui, devenez tout à coup maussade et insolent plus qu’à l’ordinaire ; il vous chassera, et, pour vous venger, vous direz tant de mal de lui à vos camarades, qu’il ne pourra plus trouver aucun bon domestique pour le servir. »
    Nous devons à la vérité de reconnaître que nombre de gens de maison appliquent encore à la lettre les préceptes de Swift, sans avoir eu besoin de s’inspirer de son Traité