Page:Cahiers de la Quinzaine - 8e série, numéros 1 à 3, 1906.djvu/253

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pullule à Paris en France, haïssent mortellement le génie et les œuvres du génie. C’est même le seul sentiment sincère qu’on leur connaisse.

Tout autre est la situation d’un Renan, et c’est une situation presque véritablement unique. D’une part en effet il n’est point un de ces hommes essentiels, c’est-à-dire qu’il n’est point un de ces hommes où n’apparaît pas ce point de rupture. Et d’autre part, sous des aspects de frivolités qui allèrent souvent jusqu’à sembler devenir des mondanités odieuses, il est constant qu’il eut de constantes préoccupations métaphysiques, philosophiques, religieuses. Mais ses occupations d’historien et ses préoccupations de philosophe ne communiquaient point entre elles. Du moins ainsi. Tantôt il était d’un côté, tantôt il était de l’autre. Tantôt il se mouvait dans ses occupations. Tantôt il se mouvait dans ses préoccupations. Il était deux hommes. Mais jamais il ne passait de l’un à l’autre d’un mouvement continu. Tantôt il était d’un côté de ce point de discontinuité. Tantôt il était d’un autre côté, de l’autre côté. Jamais il n’obtint, jamais il ne réalisa cette suppression totale, ou plutôt cette non existence absolue de ce point même de discontinuité, cette communication absolument libre qui fait une marque des génies.

C’est pour cela qu’il nous sera particulièrement précieux dans nos recherches. Un Michelet n’est pas commode pour des petites gens comme nous. De là