Page:Cahiers de la quinzaine, série 13, cahier 8, 1911.djvu/22

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douloureuse ; et je suivais du regard mon arbre dans toute sa croissance, depuis les racines du sein noir jusqu’aux glands des planètes et à ces capitules de lumière, qu’on dit aussi naïvement asters.

J’étais là, comme une écaille à l’écorce de la vie et de la terre.

Et pourtant, dans cette stupeur profonde, mon âme pleine d’amour était la sève même de l’arbre. Et j’ai parcouru toute la colonne de l’aubier vivant. Et, toujours montant, dans mon silence, je palpitais au firmament entre telle et telle fleur céleste, ou pensée, ou sentiment.

Alors j’ai senti, dans la fière cohorte de ceux que j’aime le plus, comme l’explosion d’un salut ; ou bien, au milieu d’une joie déchirante, telle la rencontre, souriant, du mort le plus chéri, se levant pour me donner la main et me baiser au front, ce nom et cette présence admirables : Dostoïevski.

En lui, je veux me discerner moi-même. Il