Page:Cahiers de la quinzaine, série 13, cahier 8, 1911.djvu/98

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Il n’est rien dans Nietzsche, qui ne soit dans Dostoïevski. Mais tandis que tout est négation, dans Nietzsche, même ce qu’il affirme, — et lui, d’abord, le malheureux, — toutes les négations, que la douleur de vivre arrache à Dostoïevski, se résolvent dans une affirmation invincible : de la douleur, l’amour conclut, en lui, à la beauté de la vie. Ce n’est pas le : Oui ! de la volonté ou de l’orgueil, ce oui glacé qui est le soleil polaire des stoïques ; mais l’amour qui, en portant la vie, l’affirme.

Un tel arbre donne les fruits de toute douceur. J’en ai ployé les branches, et je les veux réunir dans la rosée qui les trempe depuis l’offrande de l’aube jusqu’au sacrifice du crépuscule, et même dans l’ardeur de midi.

Dostoïevski pleure avec délices, et ses amis pleurent bien souvent comme lui. Je dirai, pour moi aussi, le mystère des larmes. Dostoïevski connaît la merveilleuse humilité des bonnes larmes. Et certes, il est en elle un grand secret.

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Larmes de la tendresse, pluie qui espère et qui renouvelle la forêt humaine, vous êtes la source ouverte aux cœurs pleins d’amour. Et partout où l’on frappe ce tendre rocher, l’ondée s’épanche ; et elle n’est jamais tarie, cette eau amoureuse. Quel orgueil vient de plus haut ? Or, elle ne fond pas sur les feuilles : elle se donne et les pénètre. Et parce qu’elle se penche vers la prairie, on la