Page:Cahiers de la quinzaine, série 6, cahiers 1-3.djvu/725

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des émotions, dans des impulsions comme avec des phylactères. Chad Gadya ! Chad Gadya ! Cette mélodie même éveillait d’innombrables associations d’idées. Il revit en un rapide panorama la vie intérieure intense d’un enfant aux cheveux bouclés, flânant dans l’étroite enceinte du Ghetto parmi les hautes maisons pittoresques. Un reflet de ses anciennes joies enfantines pendant les jours de fête brilla dans son âme. Qu’elle était charmante cette succession antique de Pâques et Pentecôte, Nouvel An et Tabernacles, cette survivance de l’antique Orient dans la moderne Europe, cette vie dans l’âme des ancêtres, comme pendant les Tabernacles on vivait dans leurs demeures ! Un désir soudain le saisit de chanter avec son père, de s’envelopper dans une écharpe à franges, de se balancer dans le rythme passionné de la prière, de se prosterner dans la synagogue. Pourquoi ses frères avaient-ils jamais cherché à sortir du joyeux esclavage du Ghetto ? Son imagination le lui montra tel qu’il était avant sa naissance : un camp bordé d’arcades de boutiques, les marchands hébreux à barbes noires dans leurs longues robes, les portes de fer