Page:Cahiers de la quinzaine, série 6, cahiers 1-3.djvu/734

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

aussi le premier dans le scepticisme, le plus prompt à pénétrer dans le cœur vide des choses, semblable à un vent perdu, gémissant autour des terres disparues de l’univers. Savoir que tout est illusion, duperie, qu’on appartient soi-même à la race la plus dupée de l’univers, prestigieusement attirée vers une carrière de sacrifice et de mépris ! Si encore elle pouvait garder l’espoir qui mettait une auréole aux souffrances ! Mais maintenant c’est une vipère, — non une divine espérance, — qu’elle nourrit dans son sein ! Il se sentait si seul ; une grande étendue de noir, un étang désolé, une falaise nue au-dessus d’une mer de glace, un pin sur une montagne. Que tout soit fini, les soupirs et les sanglots et les larmes, les défaillances de cœur, les pénibles jours qui se traînent et les nuits de douleur. Que de fois il avait tourné sa face contre la muraille appelant la mort !

Peut-être étaient-ce les pierres de la cité morte, et la mer qui agissaient ainsi sur son esprit. Tourguenief a raison : ce sont les jeunes seuls qui doivent venir ici, non ceux qui ont vu, comme Virgile, les