Page:Cahiers de la quinzaine, série 9, cahier 1, 1907.djvu/103

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mais une beauté parfaitement horizontale, assez latitudinaire et toute longitudinaire ; une beauté infiniment superficielle et linéaire ; une beauté de platitude parfaite, sans un défaut, sans une vilenie, sans un manque, sans une petitesse ; le pays des véritables couchers de soleil ; car le soleil couchant ne s’y couche point pour tel ou tel point, pour tels ou tels coins de la terre en particulier ; il ne s’y couche point successivement et en plusieurs fois ; en plusieurs voyages ; il n’y fait point le romantique ; il n’y accroche point plus ou moins désespérément des derniers rayons, des rayons extrêmes, des rayons suprêmes, plus ou moins successifs, plus ou moins définitifs, à quelques sommets ; à quelques cimes, à quelques creux ; non il n’y meurt pas en plusieurs fois ; il n’y meurt pas en plusieurs voyages ; il ne fait pas le grand voyage en plusieurs voyages ; il ne prend pas au guichet des allers et des retours ; mais empruntant la grande manière classique, ou plutôt la créant sans doute, sans déclamations et sans préférences, dans une implacable et sereine égalité, sans un caprice d’adieu pour tel ou tel coin de la misérable terre, dans une égalité parfaite, sans une fantaisie, dans toute son ampleur plane et toute son amplitude, dans toute sa majesté couchée, tous les soirs il se couche, tous les soirs il meurt d’un seul coup pour le monde, en une seule fois pour tout le monde, sans un regret, perdu, pour un détail de la terre, sans une amitié particulière terrestre, sans égarer un rayon, sans un de ces rayons de brocanteur qui s’accrochent aux détails temporels comme quelqu’une de ces odieuses couronnes d’immortelles qui lugubrement s’accrochent aux piquants en bronze véreux des grilles des tombeaux des cimetières.