Page:Cahiers de la quinzaine, série 9, cahier 1, 1907.djvu/106

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moins de prise à la tempête, le moins de surface au malheur.

Bâtiments de blé, insubmersibles aux tempêtes de terre, qui debout contre le vent, contre les larges vents d’automne, contre les durs vents d’hiver, contre les mous vents d’ouest, contre les secs vents d’est, contre la neige, contre la grêle, contre les interminables pluies, contre ces pluies inépuisables d’automne et des hivers doux, contre ces éternités de pluies figurations d’éternités, où tout l’air pleut, où le vent pleut, où le ciel pleut et vous pénètre l’âme, comme si ce fût ensemble et indéfiniment et on ne sait plus si c’est la pluie qui vente, le vent qui pleut, debout contre les quatre points cardinaux, et même, eux aussi, contre tous les points collatéraux que l’on voudra, par tous les temps sans bouger de place naviguez indifféremment contre tous les temps, grands bâtiments de charge qui faites et tenez tête à toutes les tempêtes de terre, bâtiments qui naviguez toujours, et toujours à la cape, bâtiments au gros ventre, au ventre plein, non obèse, bâtiments aux courbes nautiques, dessinées pour fendre les vagues du vent, les vagues de la pluie, les vagues de l’infortune.

Bâtiments de blé, navigateurs infatigables, qui dans vos ventres de blé, dans vos flancs droits et courbes défendez et sauvez le blé précieux.

Alors, à cette saison, terre de chaumes, plancher dur aux semelles, entre les meules rebelles à l’infortune ; sol universellement pointu, piquant aux pieds ; et alors ensuite, entre les deux moissons, entre la moisson qui vient et la moisson qui s’en va, entre le blé qu’on va semer et le blé qu’on vient de ramasser, entre le blé futur, dont on sait qu’il viendra, et le blé passé, que l’on