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une protestation contre la civilisation capitaliste… protestation purement négative… réactionnaire… protestation de classes extra-capitalistes et dont le capitalisme vient bouleverser la vie. Tout autre est la protestation syndicaliste »[1]. Et M. Berth, s’appuyant sur des textes de son maître, Proudhon[2], n’a point de peine à mettre en évidence la différence de l’anarchisme qui fait de l’individu « un absolu incapable à ce titre d’entrer dans aucune combinaison sociale », et le syndicalisme pour qui « la société est la vraie réalité dont l’individu n’est qu’une abstraction ».

Toute forme construite sur le modèle des idées individualistes de la démocratie, tout romantisme social, est donc, par définition, incapable de contenir le syndicalisme, libre expression de la sensibilité et de l’intelligence ouvrières qui, à l’atelier, apprend surtout à connaître les bienfaits de l’association. Le bergsonisme va servir à Sorel, à Berth et à leurs disciples pour défendre cette philosophie spontanée contre la critique bourgeoise et pour résumer la morale du syndicalisme.

Cette seconde préoccupation est ancienne chez Sorel. En 1899, il publia un article intitulé « l’éthique du socialisme »[3], où il essaya de le dégager du socialisme des choses, plus intéressant, selon le mot de Merlino, que le socialisme des socialistes. Il distingue d’abord une contradiction interne du socialisme qui prétend s’appuyer à la fois sur le droit naturel, en souvenir de la Révolution française, et sur le droit historique, comme le lui commande la tradition marxiste. Le véritable mouvement socialiste ne doit son point d’origine qu’au second.

  1. Berth. Nouveaux aspects du socialisme.
  2. Proudhon. Lettre sur le Progrès.
  3. Georges Sorel. L’éthique du socialisme. Revue de métaphysique et de morale. 1899.