Page:Cahiers du Cercle Proudhon, cahier 2, 1912.djvu/9

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

nisme sont donc chez Sorel deux termes de sens très proche. Il importe d’autant plus de marquer l’origine purement critique de l’antiintellectualisme sorélien.

En 1881, analysant l’emploi de la notion de cause dans les sciences physiques[1], Sorel montrait de quelle façon la science actuelle admet l’autonomie des causes et pourquoi elle rejette le principe de l’action mutuelle de toutes les substances formulé par Kant. Un peu plus tard[2], il montrait l’importance exagérée donnée aux postulats dans la mathématique contemporaine. Pour favoriser les thèses kantiennes, on fait de celle-ci une science en dehors de la nature, fondée sur de pures données de l’esprit. Mais combien les Anciens, créateurs de la géométrie, qui devaient, après tout, s’y connaître, en avaient une notion différente.

La science antique — Sorel le prouve en divers endroits de son œuvre — était prise à l’origine dans la pratique des arts. La géométrie, pour Euclide, était la doctrine des fonctions graphiques de la ligne droite et du cercle, et tout naturellement, il suppose qu’on est armé pour faire subir aux cercles et à la ligne droite les opérations qui épuisent leur nature à l’état isolé, des procédés utilisés par cette même pratique des arts. C’est une habitude d’images techniques empruntées à l’architecture qui faisait paraître aux anciens géomètres la surface plus intéressante que la ligne et concevoir la ligne elle-même comme l’intersection de deux surfaces. Des théorèmes élémentaires comme celui qui démontre qu’en un point pris sur une droite on ne peut tracer qu’une seule perpendiculaire à cette droite en se servant du déplacement progressif d’une oblique,

  1. Georges Sorel. L’idée de cause en physique. Revue philosophique, 1887.
  2. Georges Sorel. Le système des mathématiques. Revue de Métaphysique et de Morale. 1900.