Page:Cahiers du Cercle Proudhon, cahier 2, 1912.djvu/10

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impliquent en réalité la considération de grandeurs dont la somme est constante et qui varient de façon continue. Notre intuition nous guide, guidée elle-même par le souvenir des pierres taillées et des images de stéréotomie. Quant au nombre, dont Sorel admet, comme Bergson, l’origine spatiale, il résulte de groupes de figures rigides dépouillées de leur caractère d’étendue. Enfin, il montre que le point de départ dans le sensible du raisonnement mathématique explique l’usage des symboles algébriques, cellules vides sur quoi l’on opère librement, mais où l’on peut à volonté replacer les quantités réelles.

Dans un autre essai[1], Sorel démêle les préoccupations métaphysiques des physiciens contemporains. Il regarde comme une conséquence du calcul infinitésimal la rupture entre la physique et la philosophie de la nature. Lorsqu’on veut exprimer la vitesse de la variation de deux grandeurs, on ne fait que déterminer les différences qui existent entre les deux grandeurs considérées à deux époques quelconques, aussi éloignées qu’on le veut.

Il n’y a donc que des différences quantitatives étendues sur le cours du temps et jamais aucune détermination propre à un instant donné. La science fut non seulement une prévision, mais une recherche de l’essence des choses ; sa première ambition était de disserter de natura rerum. Mais, aujourd’hui, le scepticisme des physiciens — parfois excessif — la fait renoncer à ces prétentions ou du moins lui en donne d’autres. La principale cause de ce scepticisme, comme l’indique Sorel, est la possibilité fréquemment constatée d’arriver au même résultat par des hypothèses différentes. Les théo-

  1. Georges Sorel. Les préoccupations métaphysiques des physiciens contemporains.