Page:Cahiers rationalistes - 1972 - n° 288-289 (extrait Hommage à Paul Langevin, La vie l’œuvre et l’action).djvu/19

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

entière. Il y fut débattu d'une autre grande crise de la physique : celle des quanta. La notion de quantum[1] avait été introduite en 1900 par Max Planck pour interpréter les lois expérimentales de l'équilibre thermique du rayonnement à l'intérieur d'un four, dont la théorie électromagnétique ne permettait pas de rendre compte. Dès avant la guerre, et surtout dans les années qui suivirent, de nombreux travaux rendirent plus flagrante la contradiction entre la théorie électromagnétique classique, domaine du continu, et la conception nouvelle du rayonnement discontinu (photons). Une synthèse s'imposait, à laquelle conduisirent des découvertes essentielles qui illustrèrent notamment les noms des physiciens allemands Heisenberg, Born, Schrödinger, et celui de Louis de Broglie. C'est ce dernier, on le sait, qui, le premier, proposa d'attribuer à la matière, comme on l'avait fait pour la lumière, une dualité de structure : à l'aspect corpusculaire serait associé celui d'ondes, dont les caractéristiques furent peu à peu précisées par le calcul, puis confirmées par l'expérience[2]. Cette synthèse, qui, aujourd'hui encore — non plus que celle de la relativité — n'est pas entièrement achevée, a permis des progrès considérables dans l'étude des phénomènes intra-atomiques, ainsi que dans l'analyse du rayonnement qui nous vient du soleil et des autres étoiles.

En ces années où les problèmes de la physique s'avéraient d'une complexité croissante, Paul Langevin se plaçait plus que jamais à l'avant-garde du progrès. Son intuition d'une extraordinaire perspicacité, son jugement ferme et lucide, d'ailleurs toujours prêt à s'incliner devant le verdict de l'expérience, expliquent qu'il soit devenu le guide et le conseil

  1. Cette notion caractérise le fait que les échanges d'énergie entre la matière et le rayonnement ne peuvent se faire que par quantités finies, et non pas de manière continue.
  2. A l'origine concept purement abstrait, ces ondes devaient déterminer par leur intensité la probabilité de présence d'une particule à une distance donnée du noyau, et se propager à la manière des ondes qui se forment, sur une eau calme, au point de chute d'un caillou. Leur réalité fut confirmée de manière éclatante par les expériences de Davisson et Germer (1927) sur la diffraction électronique.