Page:Cahiers rationalistes - 1972 - n° 288-289 (extrait Hommage à Paul Langevin, La vie l’œuvre et l’action).djvu/25

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antagonistes qui nuisent aux décisions les plus essentielles : notamment les rivalités qui se font jour dans bien des cas entre le groupe socialiste SFIO et le Parti communiste. Sans pouvoir faire ici un historique, même succinct, des remous politiques et des luttes sociales qui, en cette période tourmentée, furent intimement mêlées à la défense des libertés et à la lutte antifasciste, rappelons, en raison de son importance, l'émeute à main armée de factieux d'extrême-droite qui, le 6 février 1934, s'attaqua au Parlement et faillit s'emparer du pouvoir. A cette émeute sanglante qui plongea le pays dans la stupeur répondit en quelques jours, avec une extraordinaire spontanéité, une immense manifestation démocratique dans la France entière : prélude au gouvernement d'unité qui, sous le nom de « Front populaire », devait s'instaurer deux ans plus tard. A l'imposant défilé organisé à Paris par les formations de tous ordres, prirent part les intellectuels de gauche, que les militants se montraient du doigt tant le fait était inusité ; parmi eux Paul Langevin. Ce moment marque l'engagement décisif dans la lutte extérieure, le renoncement définitif à la « paix des laboratoires ». Certes, Paul Langevin n'abandonne pas ses tâches d'homme de science. Grâce à son extrême rapidité de lecture, et d'assimilation, il se tient au courant des nombreux mémoires qui continuent de paraître, et poursuit la « bataille du déterminisme ». Il assure aussi avec tout le soin nécessaire la publication des importantes réunions Solvay de 1933, et commence à préparer le Conseil prévu pour 1936. Mais il n'a plus le temps matériel d'accorder aux questions théoriques d'assez mûres réflexions pour y apporter des contributions personnelles, ce que déplorent nombre de ses élèves et de ses amis ; car les sollicitations du dehors, tant individuelles que collectives, se font de plus en plus pressantes. Sur le plan individuel, c'est bientôt l'incessant défilé de réfugiés politiques de toutes origines, qui savent trouver auprès de lui une aide souvent efficace, et toujours un réconfortant accueil. Jamais il n'écourta d'un geste les confidences prolongées qui lui faisaient perdre un temps précieux pour son travail ou son repos. Et combien de fois devant certains cas difficiles, sa bourse s'ouvrit-elle spontanément pour une aide « momentanée », qui, presque toujours, devint définitive!