Page:Calderón - Théâtre, trad. Hinard, tome I.djvu/100

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
66
MAISON À DEUX PORTES.

calabazas.

Ah ! malheureux Calabazas, qui t’inspira la fantaisie d’espionner ?

lisardo, à part.

Maintenant que don Félix est éloigné, je puis quitter la partie. Le courage et l’honneur le permettent. — On me reconnaîtrait.

Il sort.
fabio.

Attends, lâche, attends-moi.

calabazas.

Qui eût jamais dit que mon maître dût m’abandonner en pareille occasion ?

lelio, renrontrant Calabazas.

En voici un qui est resté !

fabio.

Qu’attends-tu, Lelio ? Tue-le !

calabazas.

Au nom de Dieu, arrêtez !

fabio.

Qui êtes-vous ?

calabazas.

Je suis seulement, si ma crainte ne m’abuse, un curieux mal avisé[1].

fabio.

Donnez-nous votre épée.

calabazas.

La voici, mon épée, seigneur ; et si ce n’est pas assez, voici encore ma dague ; et si ce n’est pas assez, je vous donnerai encore mon manteau, et mon chapeau, et mon pourpoint, et mes culottes.

fabio.

Ne seriez-vous pas le valet de celui qui a outragé ma maison ?

calabazas.

Oui, seigneur ; mon maître est un outrage-maison insupportable[2].

fabio.

Oui est-il ? et comment se nomme-t-il ?

calabazas.

Il se nomme Lisardo ; il est militaire et ami de don Félix.

fabio.

Pour ne pas commencer mes vengeances par la moindre, je te laisse la vie.

calabazas.

Merci, monseigneur.

Il sort.
  1. Nous serions fort trompé si, dans ce passage, Calderon ne faisait pas allusion à une nouvelle que Cervantes a inséré dans le Don Quichotte, et qui a pour titre : le Curieux malavisé (el Curioso impertinente).
  2. Nous avons traduit mot à mot :

    Es un agravia casas
    Que no se puede sufrir