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iii
NOTICE SUR CALDERON.

qui lui confia la direction de ses fêtes, et il passa plusieurs années à la cour comme intendant des plaisirs dramatiques du roi. Celui-ci, pour prix de ses nouveaux services, lui donna l’habit militaire de Saint-Jacques. Calderon prouva qu’il était digne de cette haute distinction. En 1640, les chevaliers des quatre ordres ayant été appelés à l’armée de Catalogne, commandée par le comte-duc Olivarez, le roi, qui désirait une comédie de son poète favori, voulut le dispenser de la campagne ; mais Calderon eut à cœur de satisfaire à toutes ses obligations : il composa rapidement sa comédie, et se hâta d’aller rejoindre l’armée en Catalogne (5).

À la paix il revient à la cour, où le roi lui donne, sur le fonds de l’artillerie, une pension de trente écus par mois somme qui ne laissait pas que d’être assez considérable pour le temps, surtout si l’on songe à l’état de détresse où devaient se trouver en ce moment les finances d’Espagne. Cette faveur, Calderon la reconnaît en travaillant à de nouveaux ouvrages. Quelques années après, lors du mariage du roi avec Marie-Anne d’Autriche sa nièce, on voit le grand poète composer les devises des arcs de triomphe dressés en l’honneur de la princesse.

En 1651, Calderon entra dans les ordres sacrés. Il avait commencé et finissait comme Lope. Les motifs qui le déterminèrent peuvent aisément s’apprécier. Ce fut d’abord, on n’en saurait douter, la dévotion la plus sincère et la plus ardente. Mais, si je ne m’abuse, la situation où se trouvait alors l’Espagne ne dut pas être tout-à-fait étrangère à cette résolution. L’Espagne, si puissante sous Charles-Quint, et même encore sous Philippe II, un demi-siècle auparavant, expiait sa grandeur passée ; elle perdait ses plus riches provinces, subissait des revers inouïs (6). On comprend dès lors qu’une âme fière et sensible ait renoncé à servir sous un drapeau humilié, et se soit réfugiée dans la religion et la poésie, qui toutes deux lui montraient la gloire.

Selon l’esprit et les habitudes de ce temps, Calderon, en entrant dans les ordres, n’en eut que plus de loisirs à donner au théâtre. Mais, à présent, ce fut l’Église qui récompensa ses travaux. Nommé d’abord chapelain des Rois nouveaux de Tolède (7), il ne tarda pas à être rappelé par le roi, qui le nomma son chapelain honoraire, en lui laissant les émolu-