Page:Campan - Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, tome 2.djvu/107

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Au mois de mars suivant, j’eus occasion de connaître le véritable sentiment du roi, sur les évasions qui lui étaient sans cesse proposées. Un soir, vers dix heures, M. le comte d’Inisdal, député par la noblesse, vint me prier de l’entendre en particulier, ayant une chose importante à me communiquer. Il me dit que, dans cette même nuit, on devait enlever le roi ; que la section de la garde nationale, commandée ce jour-là par M. d’Aumont[1], était gagnée, et que les attelages de chevaux donnés par de bons royalistes, étaient posés en relais à des distances convenables ; qu’il venait de quitter une partie de la noblesse réunie pour l’exécution de ce projet, et qu’on l’avait envoyé vers moi pour que j’obtinsse, avant minuit, un consentement positif du roi par le moyen de la reine ; que le roi avait connaissance de leur plan ; mais que jamais Sa Majesté n’avait voulu se prononcer d’une manière précise ; et qu’à l’instant d’agir, il était nécessaire qu’elle consentît à cette entreprise. Je me rappelle que je désobligeai beaucoup le comte d’Inisdal en exprimant mon étonnement de ce que la noblesse, à l’instant d’exécuter un plan de cette im-

  1. Frère de M. de duc de Villequier qui avait embrassé le parti de la révolution, homme nul et sans considération, qui se faisait appeler Jacques Aumont, bien opposé à son brave frère, qui s’est toujours montré entièrement dévoué à la cause de son roi.
    (Note de madame Campan.)