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enlevèrent son épée. Le roi et sa famille furent forcés de descendre de voiture et de rentrer dans leurs appartemens. Cet outrage ne leur fut pas intérieurement très-sensible ; ils y virent un motif de légitimer, aux yeux du peuple même, le projet qu’ils avaient de s’éloigner de Paris.

Dès le mois de mars de la même année, la reine s’occupa des préparatifs de son départ. Je passai ce mois auprès d’elle, et j’exécutai une grande partie des ordres secrets qu’elle me donna à ce sujet. Je la voyais avec peine occupée de soins qui me semblaient inutiles et même dangereux, et lui fis observer que la reine de France trouverait des chemises et des robes partout. Mes observations furent infructueuses : elle voulut avoir à Bruxelles un trousseau complet, tant pour elle que pour ses enfans. Je sortais seule, et presque déguisée, pour acheter et faire faire ce trousseau.

Je commandais six chemises dans une boutique de lingère, six dans une autre, des robes, des peignoirs, etc. Ma sœur fit faire un trousseau complet pour Madame, sur les mesures des hardes de sa fille aînée, et je commandai des habits pour M. le dauphin, sur celles de mon fils. Je remplis une malle entière de tous ces objets, et l’adressai, par ordre de la reine, à une de ses femmes, veuve du major d’Arras où elle se trouvait en congé illimité, afin qu’elle fût prête à partir pour Bruxelles ou pour tout autre lieu, lorsqu’elle en recevrait l’ordre. Cette dame avait des terres dans la partie de