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l’officier se plaçait dans un fauteuil, entre les deux portes, la tête tournée du côté de Sa Majesté. On obtint seulement que la porte intérieure serait fermée quand la reine se lèverait et s’habillerait. La reine fit placer le lit de sa première femme très-près du sien ; ce lit, roulant et garni de rideaux, la préservait d’être vue par l’officier.

Madame de Jarjaïe, ma compagne, qui continua ses fonctions pendant tout le temps de mon absence, m’a raconté qu’une nuit le commandant de bataillon, qui couchait entre les deux portes, voyant qu’elle dormait profondément, et que la reine veillait, quitta son poste et s’approcha de Sa Majesté pour lui donner des avis sur la conduite qu’elle devait tenir. Quoiqu’elle eût la bonté de lui dire de parler plus bas, pour ne pas troubler le sommeil de sa première femme, celle-ci fut éveillée et pensa mourir de saisissement en voyant un homme en uniforme de la garde parisienne si près du lit de la reine. Sa Majesté la rassura, lui dit de ne pas se lever, que la personne qu’elle voyait était un bon Français, trompé sur les intentions et sur la position de son souverain et de la sienne, mais dont les discours annonçaient un véritable attachement pour le roi. Il y avait une sentinelle dans le corridor noir qui règne derrière cet appartement, et où se trouve un escalier, qui alors était intérieur et servait au roi et à la reine pour communiquer librement. Ce poste très-désagréable, puisqu’il fallait le garder vingt-quatre heures, fut souvent réclamé par Saint-Prix,