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acteur des Français. Il s’y était en quelque sorte dévoué pour favoriser de courts entretiens que le roi et la reine avaient dans ce corridor. Il s’éloignait d’eux et les avertissait s’il entendait le moindre bruit. M. Collot, commandant de bataillon de la garde nationale, chargé du service militaire de l’intérieur de la reine, allégea de même, avec prudence, toutes les consignes révoltantes qu’il avait reçues ; par exemple, celle de suivre la reine jusqu’à la porte de sa garde-robe, ce qui ne fut jamais exécuté. Un officier de la garde parisienne osa parler de la reine avec insolence dans son propre appartement. M. Collot voulut en porter plainte à M. de La Fayette, et le faire casser. La reine s’y opposa, et daigna dire à cet homme quelques mots de raison et de bonté ; il devint à l’instant même un de ses partisans les plus dévoués.

La première fois que je revis Sa Majesté, après la funeste catastrophe du voyage de Varennes, je la trouvai sortant de son lit ; ses traits n’étaient pas extrêmement altérés ; mais, après les premiers mots de bonté qu’elle m’adressa, elle ôta son bonnet, et me dit de voir l’effet que la douleur avait produit sur ses cheveux. En une seule nuit, ils étaient devenus blancs comme ceux d’une femme de soixante-dix ans. Je ne peindrai point ici les sentimens qui déchirèrent mon cœur. Il serait trop peu convenable de parler de mes peines, quand je retrace une si grande infortune. Sa Majesté me fit voir une bague qu’elle venait de faire monter pour la princesse de Lam-